Remi Rebillard (7)
© Remi Rebillard

Texte et photographies suivantes de Remi Rebillard.

 

Il fut un temps, je passais mes vacances sur une île près de la Rochelle, dans la maison d’une personnalité de la photographie. Irrésistiblement attiré par l’image, il m’arrivait de regarder furtivement son travail sur les boîtes lumineuses de l’époque, il était aussi un maître du nu !

Photographier une femme nue, c’est le risque absolu. « Le résultat peut être refoulant, pudibond ou vulgaire », disait Philippe Sollers, comme le photographe lui-même dans la plupart des cas.

Aujourd’hui ce que j’écris n’a plus beaucoup de sens puisque Internet et les téléréalités nous diffusent de l’imagerie exhibitionniste et grimaçante, destinée aux profanateurs.

Photo 1

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© Remi Rebillard

Cette image est peut-être ma préférée, la lumière solaire filtrée sur l’épaule, bénédiction du temps, la modèle avait tout compris ce jour-là, même si quelques fois, très rarement, les réticences saisies peuvent devenir des moments de grâce. Brassaï disait: « La vie ne fournit que l’accidentel, et la tâche de l’artiste est de transformer cet accidentel en immuable ». Doisneau disait aussi que « pour être photographe, il suffit de savoir regarder à l’envers ».

Photo 2

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© Remi Rebillard

Pour en revenir à un moment de grâce, et comme j’aime le coté mystérieux de cette image, je ne commenterais pas sur l’impact médiatique de celle-ci.

J’étais intéressé par la volonté de cette femme à se dissimuler dans une burqa pour ne pas “s’exhiber”. Je me sentais l’âme d’un voyeur. La fascination qu’exerce sur chacun la vision de ce corps est sans doute aussi vieille que l’humanité et est probablement jusqu’à présent plus forte que les interdits religieux.

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© Remi Rebillard

Un ami artiste, Bertrand Jubert, m’a écrit récemment sur cette photo : « Contraste puissant de forme, de ton, de texture et d’idéologie dans une harmonie infaillible. J’ai autant envie de caresser cette fesse lisse que ce mur granuleux»…Une remarque qui n’est pas sans me rappeler le mot de Louis Jouvet, qui avait en plus de son immense talent, l’humour et la dérision. Ainsi quand il rencontrait un homologue ou un artiste, il na manquait pas de lui serrer la main en lui disant : « Serrons-nous la main, le talent n’est pas contagieux ! »

La lumière

Gaspard Felix Tournachon, grand portraitiste, disait qu’il pourrait apprendre la technique à son cocher, mais que si ce dernier n’avait aucun sens de la lumière, il ne pourrait rien pour lui.

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© Remi Rebillard

Je revendique le daylight, la lumière du jour à travers les Skylights (verrières au plafond) exposés au nord comme à New York, dans mon petit atelier, sur la 11ème rue.

J’aime le mélange de Kino-flo filtrés, ou les back-light (contre-jour solaires filtrés, mixés avec des flashes électroniques).

J’aime les “accidents de lumière” , que l’on découvrait sur les polaroids , surement parce que je perd la mémoire, et qu’au fil du temps , elle est devenue plus sélective .

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© Remi Rebillard

J’aime les contrastes, les ciels sombres, les chairs caramel claires, les mouvements, les vagues, je suis fasciné par le résultat des longs temps de pause, lies aux mouvements , par les surprises, les accidents ou les moments souvent peu visibles à l’œil.

Il m’a été proposé à plusieurs reprises à New York de parler de ma technique sur une photo choisie par le magazine. En dépit de mes explications, le journaliste me demanda de rajouter des sources de lumières, flashes ou autres car, pour lui, il n’y en avait pas assez !!

Nous sommes bien aux États Unis, le pays du gigantisme, et des excès, le pays du toujours plus, alors qu’une image, à la lueur d’une bougie peut devenir une réussite, ou une certaine forme de la grâce.

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© Remi Rebillard

Imaginez la réaction de la production qui demanderait mes besoins en matière de lumière, pour la prise de vue d’une starlette ? Des bougies!…

Le « noir et blanc » et la couleur

Je pense toujours d’abord à la célébrité parisienne, que j’ai eu l’occasion de connaître un peu, et qui disait dans son livre (Écrire avec la lumière) : « Le noir et blanc, c’est comme un smoking. Facilement élégant, mais sans la grâce, il n’y a qu’un pas entre Fred Astaire et un maître d’hôtel ».

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© Remi Rebillard

J’aime les contrastes en monochrome avec du détail dans les ombres. Je citerais évidemment le Brésilien qui vit à Paris, Sebastião Salgado, probablement le plus copié. Face au petit écran de mon computer, je suis revenu hier sur le travail de Sarah Moon, qui a longtemps marqué mes débuts, pour ses images typiquement féminines. Le noir et le blanc sont souvent utilisés ensemble pour symboliser une dualité totale. En peinture, ces couleurs permettent de donner l’impression de lumière, de créer les contrastes.

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© Remi Rebillard

De mon côté, j’ai plutôt recherché et travaillé mon style à l’aide de couleurs, de gels, de filtres, de bleus, de verts. Des manipulations de films en Laboratoires. J’ai appris très tôt, dans ma carrière à Paris, au contact des maquilleurs qui, eux, manipulaient les matières et les couleurs, et plus précisément avec Jose Luis qui disparut très jeune au début des années 90. Il était le créateur et le directeur artistique des maquillages Yves Saint Laurent. Le maquillage a, pour moi, une part importante dans l’élaboration de la lumière.

Swimmer on the beach

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© Remi Rebillard

Je viens de photographier cette nageuse, le 25 décembre vers 7 heures du matin à Miami. Elle passait durant cet instant magique. La température était de huit degrés Celsius .

Bien que le noir et le blanc restent les couleurs et le symbole pour les images anciennes, il m’arrive d’être fasciné par la nouveauté que peut avoir une image monochrome de mode ou de beauté.

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© Remi Rebillard

Les photographes qui m’intéressent aujourd’hui sont : Sebastião Salgado, Sarah Moon, Irving Penn, Bill Brandt, Francis Giacobetti, Mondino, Steven Klein , Bruce Weber, ou Paolo Roversi qui aurait dû vivre au siècle dernier. Je peux aussi être surpris par une série d’un jeune photographe. Je regarde souvent le travail de l’artiste Javier Vallhonrat, les poses des mannequins y sont toujours très travaillées. je reviens régulièrement sur les images de Newton, ou Avedon, et j’en oublie…

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